LA PENSEE GEOMETRIQUE : Pour la mise en condition de notre imagination, commençons par nous mettre à l’eau : Quelques coups de rame pour rejoindre le pic, ou plus si la barre est musclée, et nous voilà posés au calme, pour récupérer de l’effort. Encore en retrait, le surfeur entre dans la musique en observant la houle venir. La respiration se fait plus ample, plus profonde en s’imprégnant du spectacle vivant de ce lieu. La lecture de vague se fait naturellement, dans le silence, elle est contemplative : Les lignes se dessinant au large captent toute l’attention. La série d’ondes qui apparait, estompe les dernières pensées qui polluaient encore l’attention. L’onde arrive et bascule majestueusement en éjectant sa lèvre. Le regard mémorise la position du pic et suit le déferlement. La zone creuse trace sa partition verticale dans l’espace. Le spectacle de la trajectoire d’amis surfeurs nous dynamise, l’empathie sublime l’instant.

penser surfOn imagine une trajectoire dans la dernière vague qu’on laisse passer, le désir d’action nous emporte et on monte se placer au pic. C’est ici que la vague commence sa fin, nous sommes là pour en témoigner respectueusement :

1. Des coups de rame puissants, des battements, comme dans ce rêve ou l’on parvient à voler, accordent la vitesse de la planche sur l’onde qui arrive à son point de déferlement,

2. Poussée sismique de l’onde de houle, basculement, chute libre, disparition du poids, ce sont les déclencheurs du take off réflexe,

3. L’accélération libérée par la pente, augmente la pression sous la planche, en planing, la position debout devient naturellement stable, ça glisse, ça vole !

4. Le flux vibre sous la planche, sa note raisonne dans nos pieds, pour remonter notre colonne vertébrale. Sa musique nous transmet la texture du contact, comme le saphir dans le sillon d’un vieux 33 tours qui nous transporte vers la face cachée de la lune.

5. Je vise le Still-point

Le temps accordé à la lecture ces 5 lignes est 20 fois supérieur à la durée de l’action réelle. Si la scène était pensée comme ce souvenir, agréable, de l’évènement, le cerveau n’aurait jamais su formuler et ordonner la suite de gestes nécessaires à sa réussite. Quand on surf on ne pense pas, sinon l’objectif disparaît, masqué par les pensées. En rejoignant le pic, le surfeur à basculé en « pensée géométrique ». Cette méthode visuelle de concevoir des projets est plus rapide que la pensée, car elle n’est pas « formulée ». Lorsque la géométrie de l’instant remplit totalement l’esprit du surfeur, l’image subjective de la vague révèle des courbes guides. Rien de mystique, juste des transformations de repères et des alignements, tous les marins connaissent cela.

Le Still-point symbolise la quête du surfeur et de la surfeuse, mais il a aussi une dimension physique. Comment le Still point sert de guide géométrique pour l’improvisation des trajectoires? Cette question mérite un chapitre:

Le still point, cœur du surf?

 

Remarque sur L’ACTION INTUITIVE:

Il est particulièrement délicat de mêler analyse technique et sensations, nous devons donc écarter les malentendus en nous accordant sur le sens, discutable mais défini, qui est donné à l’intuitivité d’une action sur les pages de ce site. Nous sommes tous différents, et ces définitions sont sans prétention scientifique, ni philosophique, elles ne peuvent être que subjectives, et définissent peut être plus leur auteur qu'autre chose.

take off surf

• Considérons l’intuition comme un évènement précédant le raisonnement : Au stade de l’intuition, l’afflux sensoriel n’est pas encore formulé en pensée, c’est une sensation. Admettons donc ici, que l’intuition est le regroupement des données de plusieurs de nos sens, en une seule sensation globale, dessinant une image du présent dans notre esprit.

La pensée : La pensée reformule cette sensation, elle interprète l’image de l’intuition. La pensée compare et traite l’image sensorielle avec des méthodes intellectuelles raisonnées. La pensée stock ses concepts dans des mots, qu’elle formule successivement dans l’espace mental pour en extraire une phrase, un sens global. Nous pensons en lisant nos mots intérieurs. Cette action de la pensée focalise temporairement l’attention hors de l’évènement extérieur présent, de la meme maniere que nous ignorons notre respiration en lisant ces lignes.

L’intuitivité d’une action dépend de la part de données que doit traiter la pensée pour la contrôler. Un réflexe est intuitif car il n’utilise aucune pensée. Un outil est intuitif lorsqu’il est adapté aux gestes naturels, son utilisateur n’a pas besoin d’un mode d’emplois complexe pour le comprendre et l’utiliser. Il est possible de diminuer le traitement effectué par la pensée pour réaliser une action donnée, en effectuant des gammes de mouvements répétés pour qu’ils entrent en mémoire comme des réflexes. La part de conscience occupée lors de leur réalisation sera ainsi diminuée, et une chaine d’actions complexe pourra devenir plus intuitive.

surf improvisation

Ceci etant dit nous pouvons aborder: la manoeuvrabilité du surf.